« Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
Article 432-10 et s du Code pénal
La concussion est une infraction commise par un représentant de l'autorité publique ou une personne chargée d'une mission de service public qui, sciemment, reçoit, exige ou ordonne de percevoir une somme qui n'est pas due. C’est aussi le cas lorsque ce représentant ou cette personne accorde, sous une forme quelconque et pour quelque motif que ce soit, une exonération ou franchise des droits, contributions, impôts ou taxes publics en violation des textes légaux ou réglementaires.
Sont visées par l’infraction de concussion, les personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public.
La concussion entre dans la catégorie des infractions de commission qui nécessitent, pour être consommées, que l’auteur ait agi positivement et ne se soit pas contenté de s’abstenir d’agir.
Quelques exemples tirés de la jurisprudence :
Articles 432-11 et s, 433-1 1° et s, 434-9 et s, 435-1 et s, 445-1 et s du Code pénal
La corruption est une infraction ancienne (déjà visée dans le code pénal de 1810), qui a longtemps été unique dans la catégorie des manquements au devoir de probité, avant l’ajout du trafic d’influence à la fin du XIXe siècle.
Elle vise le comportement par lequel sont sollicités, acceptés, reçus des offres, promesses, dons ou présents proposés à des fins d’accomplissement ou d’abstention d’un acte, d’obtention de faveurs ou d’avantages particuliers.
L’infraction n’a cessé au fil des années, de voir son champ d’application étendu : fonctionnaires, agents publics étrangers, élus, mais aussi personnes travaillant dans le secteur privé.
La corruption active et la corruption passive sont deux infractions complémentaires mais autonomes. Les agissements du corrupteur (corruption active) et ceux du corrompu (corruption passive) peuvent être poursuivis et jugés séparément et la répression de l'un n'est nullement subordonnée à la sanction de l'autre.
En fait, le corrompu accepte, des promesses, des présents des dons et peut même les solliciter alors que le corrupteur, offre des présents et des dons, fait des promesses jusqu’à céder aux sollicitations du corrompu en lui remettant l’objet de la corruption.
Quelques exemples tirés de la jurisprudence :
Articles 432-15 et 433- 4 du Code pénal
Le détournement de fonds publics est visé par l’infraction de détournement de biens publics effectué soit par une personne chargée d’une fonction publique, soit par un particulier.
Le détournement ou la soustraction de biens publics par une personne chargée d’une fonction publique est le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l'un de ses subordonnés, de détruire, détourner, soustraire ou tenter de détruire, détourner ou soustraire, un acte ou un titre, des fonds publics ou privés, des effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui avaient été remis en raison de sa fonction ou de sa mission.
Le détournement ou la soustraction de fonds publics par un particulier est le fait de détruire, détourner, soustraire ou tenter de détruire, détourner ou soustraire, un acte ou un titre, des fonds publics ou privés, des effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui ont été remis en raison de ses fonctions à une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, à un comptable public, à un dépositaire public ou à l’un de ses subordonnés.
Quelques exemples tirés de la jurisprudence :
Article 432-14 et s du Code pénal
Le favoritisme est une infraction plus récente (1991) ayant pour but de moraliser l’attribution des marchés publics et des délégations de service public. Le délit de favoritisme protège l’impératif de probité des élus et agents publics tout en assurant le respect des règles de concurrence nécessaires au bon fonctionnement des marchés.
Ce délit recouvre la plus large catégorie d’auteurs puisqu’il concerne aussi bien les élus et agents publics que les personnes privées intervenant dans la procédure d’attribution d’un marché public, à quelque stade que ce soit, ainsi que les mandataires des personnes susmentionnées.
Le favoritisme est le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou investi d’un mandat électif public ou exerçant les fonctions de représentant, administrateur ou agent de l’ État, des collectivités territoriales, des établissements publics, des sociétés d’économie mixte d’intérêt national chargées d’une mission de service public et des sociétés d’économie mixte d’intérêt local de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou règlementaires ayant pour objet de garantir la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics et les contrats de concession.
Pour que l’infraction de favoritisme soit constituée, il est nécessaire qu’un texte précis du code des marchés publics ou du code général des collectivités territoriales régissant les marchés publics ait été violé. C’est une infraction formelle qui prévient la commission d’atteinte à la probité plus graves et souvent plus difficiles à caractériser, tel que le délit de corruption qui trouverait pour support la conclusion d’un marché public.
Quelques exemples tirés de la jurisprudence :
Le délit dit de "pantouflage" visé à l'article 432-13 du Code pénal n’est qu’une forme du délit de prise illégale d’intérêts par prise ou réception d’une participation par travail, conseil ou capitaux dans une entreprise privée[1] dont un agent public a eu la charge d’assurer la surveillance et le contrôle ou avec laquelle il a été amené à participer, y compris par émission d’avis, à la conclusion de contrats de toute nature.
Il s’agit donc d’une forme de prise illégale d’intérêts susceptible d’être commise lors des départs d’agents publics vers le secteur privé : tout agent public ayant quitté ses fonctions publiques depuis moins de trois ans ne peut obtenir un avantage (emploi, capitaux…) de la part d’une entreprise privée avec laquelle il entretenait certaines relations de travail lorsqu’il était encore en fonctions.
Le Législateur a voulu moraliser ainsi le passage des agents publics dans des entreprises privées pour éviter que ces derniers soient amenés à faire bénéficier leurs nouveaux employeurs du réseau de relations ou d’amitiés qu’ils ont pu créer dans la fonction publique.
Quelques exemples tirés de la jurisprudence :
– Le fait pour un ancien membre d’une commission d’autorisation de mise sur le marché de médicaments, qui a donné son avis sur des autorisations demandées par une société de l’industrie pharmaceutique, d’être devenu le consultant de cette société moins de trois ans plus tard
– L’ancien inspecteur des impôts ayant exercé les fonctions de vérificateur général, et qui, depuis sa révocation, a été appelé, en qualité de conseiller salarié d’une société fiduciaire, à donner à certaines entreprises privées de ce département des conseils d’ordre juridique ou fiscal ou à établir leur bilan
– Un fonctionnaire ne peut pas être nommé sous-directeur d’un établissement bancaire alors qu’il était moins de trois ans avant chef de service des affaires monétaires et financières à la Direction du trésor et a eu un contrôle direct sur cet établissement
[1] dont un agent public a eu la charge, au sens de l’article 432-13 du Code pénal, d’assurer la surveillance, le contrôle ou la participation, y compris par émission d’avis, à la conclusion de contrats de toute nature.
Les cadeaux et invitations sont des biens ou des prestations offerts, sans recherche d’une contrepartie, dans le cadre d’une relation professionnelle et pouvant s’inscrire dans l’attachement d’une entité à des valeurs ou traditions ou dans une stratégie de promotion commerciale.
Par exemple, il peut s’agir de repas au restaurant, d’une invitation à un événement sportif ou culturel, d’objets avec le logo de l’entreprise, de spécialités culinaires locales, etc.
Les cadeaux et les invitations sont des actes ordinaires de la vie des affaires et une coutume de la vie publique notamment dans les relations publiques et interinstitutionnelles. Ils ne constituent pas en soi des actes de corruption. Néanmoins, dans certaines circonstances, ils peuvent constituer un acte de corruption. Une entité a donc un intérêt à mettre en place une politique cadeaux et invitations afin de prévenir ce risque.
Pour aider les entités à définir et à mettre en œuvre une politique cadeaux et invitations, l’AFA a publié un guide sur la politique cadeaux et invitations dans les entreprises, les EPIC, les associations et les fondations.
Référence : Article 432-12 et suivant du Code pénal
Ce délit, autrefois qualifié « d’ingérence », est le fait par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité dans une entreprise ou dans une opération dont elle avait, au moment de l’acte, en tout ou en partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement.
La loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire a modifié l’article 432-12 du Code pénal. Dorénavant, le texte ne vise plus un « intérêt quelconque » mais un « intérêt de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité ». Si l’objectif annoncé du législateur est de mieux préciser cette infraction, il faudra attendre l’application qui en sera faite par la jurisprudence pour analyser l’impact réel de cette réforme.
La prise illégale d’intérêts doit être distinguée du conflit d'intérêts qui ne constitue pas en soi un délit et qui est défini par l’article 2 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique ainsi que par l’article L. 121-5 du code général de la fonction publique comme « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction.
Les membres du Gouvernement, les personnes titulaires d'un mandat électif local, chargées d'une mission de service public ainsi que les agents relevant du statut général de la fonction publique, exercent leurs fonctions avec dignité, probité et intégrité et veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d'intérêts. Un conflit d’intérêts ne faisant pas l’objet d’une réaction appropriée expose au risque de commettre l’infraction de prise illégale d’intérêts.
Quelques exemples tirés de la jurisprudence :
Les éléments constitutifs :
Conditions préalables :
Les personnes susceptibles de commettre ce délit sont :
Élément matériel :
La surveillance de l’entreprise ou de l’opération : les personnes précédemment citées doivent avoir été chargées de tout ou partie de la surveillance, de l’administration, de la liquidation ou du paiement d’une opération déterminée ou d’une transaction avec une entreprise. La jurisprudence retient également toute personne ayant participé à la préparation des actes en cause. Le simple fait de participer à une délibération portant sur une opération dans laquelle un élu a un intérêt suffit à caractériser l’infraction.
L’intérêt pris, reçu ou conservé, directement ou indirectement. Cet intérêt peut être direct (par exemple, un maire qui octroie une subvention à une association dont il est président), ou indirect, lorsqu’il est détenu par un proche de l’agent public (par exemple, un marché public attribué par une mairie à une entreprise dirigée par le gendre du maire, ou encore le fait pour un élu d’attribuer un logement social à un de ses proches). Il peut même s’agir d’un intérêt simplement moral, lorsque l’agent prend une décision avantageuse relative à une entreprise dirigée par un de ses amis.
Élément moral :
Il faut une intention de commettre l’infraction. Il n’est pas exigé que l’intéressé en ait tiré un profit personnel quelconque.
Responsabilité des personnes morales. Par principe, sauf cas expressément prévus par le Code pénal, la responsabilité pénale des personnes morales peut être engagée pour toutes les infractions pénales, y compris donc la prise illégale d’intérêts, à partir du moment où ces infractions sont commises par leurs dirigeants/ représentants, au nom et pour le compte de la personne morale.
Articles 432-11, 2° et s, 433-1, 2° et s, 434-9-1 et s, 435-2 et s du Code pénal
Le trafic d’influence est une infraction plus récente que la corruption et qui consiste à rémunérer l’exercice abusif d’une influence que l’agent possède ou prétend posséder sur un tiers, en vue de l’obtention d’une décision favorable.
Alors que le corrompu agit, ou s’abstient de le faire, dans l’exercice de ses propres fonctions, l’auteur du trafic d’influence use de son influence auprès de celui qui détient le pouvoir d’agir ou de s’abstenir.
Le trafic d’influence consiste à promettre quelque chose (à un magistrat, par exemple) non pour qu’il accomplisse des actes de sa fonction ou facilités par celle-ci, mais pour qu’il utilise son influence auprès d’une tierce personne, pour obtenir une décision ou un avis favorable, que cette influence soit réelle ou supposée.
Le fait est plus sévèrement réprimé lorsqu’il est accompli par une personne exerçant une fonction publique.
À l’instar de la corruption, il existe deux infractions indépendantes l’une de l’autre.
D’une part, le trafic d’influence passif, visant l’agent sollicité et, d’autre part, le trafic d’influence actif, visant la personne auteur de la sollicitation.
Quelques exemples tirés de la jurisprudence :